Grands principes relatifs à la réglementation française sur le prix

reglementationDans le cadre de son chantier « Quel est le bon tarif de ma solution Cloud ? », la commission finance d’EuroCloud France a abordé les grands principes relatifs à la réglementation française sur le prix. :

  • les règles relatives à la fixation du prix,
  • les règles relatives à la révision des prix,
  • les règles relatives à l’information sur les prix et la transparence.
  • les questions liées aux conditions de licence.

1. LA FIXATION DU PRIX

Le principe de libre détermination des prix

La réglementation française prévoit que les prix sont librement déterminés, notamment par le jeu de la concurrence. Ce principe s’applique à toutes les activités de production, de distribution (biens et produits) et de services, et bénéficie à tous les agents économiques, qu’ils soient privés ou publics.

Les exceptions

Le gouvernement est habilité à déroger, par voie réglementaire, au principe de liberté des prix, dans deux types de cas : d’une part, pour certains secteurs d’activité particuliers (ex: le prix du livre, des courses de taxis, de l’électricité, des transports publics urbains de voyageurs, etc.) et, d’autre part, en cas de circonstances exceptionnelles ou anormales (situations de crise, de guerre ou catastrophes naturelles) entraînant, par exemple, des difficultés sérieuses d’approvisionnement en matières premières.

Les pratiques prohibées

La règlementation française a identifié de nombreuses de pratiques commerciales illégales (anticoncurrentielles, abusives, déloyales ou trompeuses) ; elles sont sévèrement sanctionnées. Au cours de notre réunion, nous avons notamment abordé deux pratiques : la revente à perte et l’entente sur les prix.

La revente à perte est le fait de revendre un produit en l’état à un prix inférieur à son prix d’achat effectif. La prohibition légale s’applique que la revente soit faite en B-to-B ou B-to-C, et concerne uniquement la revente de produits. Les prestations de services ne sont donc pas concernées par cette infraction, à moins qu’un contrat de vente soit économiquement lié à un contrat de prestation de service (ex: vente d’un équipement informatique associée à une prestation de services informatiques). Ainsi, les règles prohibant la revente à perte ne s’appliqueraient pas à la fourniture de services Cloud.

L’entente sur les prix consiste en une action concertée entre plusieurs personnes ayant pour objet ou effet d’entraver la concurrence. Il s’agit dans ce cas de faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse. Il en va ainsi, par exemple, de la fixation des prix et/ou des marges entre les membres d’une fédération professionnelle.

DONC : les prix sont libres et les prestataires Cloud peuvent, en principe, fixer la marge qu’ils souhaitent. Le marché fait la différence. A contrario, il serait très dangereux pour des membres d’une association professionnelle de discuter des l’établissement des prix des services et de se mettre d’accord pour les fixer.

2. LA REVISION DES PRIX

La réglementation française prévoit que le contrat lie les parties (force obligatoire du contrat – art. 1134 C. civ.). Ainsi, son prix librement négocié et fixé au jour de la conclusion du contrat, se trouve figé dans un « carcan », faisant abstraction de l’environnement économique. Toutefois, plusieurs solutions existent pour pallier cette rigidité contractuelle. Au cours de notre réunion, nous en avons abordé deux :

Premier réflexe : la durée du contrat

Si votre contrat est à durée déterminée et comporte une clause permettant la poursuite des relations commerciales entre les parties à l’échéance contractuelle, il est alors possible de prévoir son renouvellement. Les parties pourront ainsi renouveler leurs relations, mais celles-ci seront régies par un nouveau contrat. Le renouvellement du contrat permet de renégocier certains termes du contrat, et donc son prix.

Il est également possible d’opter pour une reconduction contractuelle. Les parties pourront ainsi poursuivre leurs relations, mais dans ce cas, celles-ci seront régies par les mêmes conditions, prévues au contrat « initial ». Cette option peut s’avérer intéressante pour la partie qui aura négocié à son avantage le contrat initial et qui ne souhaite pas se risquer à entamer de nouvelles négociations, notamment sur le prix.

Deuxième réflexe : les clauses de renégociation et d’indexation

Pour faire face à des modifications substantielles du contexte économique, les parties à un contrat ont la possibilité d’organiser les modalités de révision ou de renégociation du prix dans des clauses contractuelles. Il ressort de la règlementation et de la jurisprudence que le prix peut évoluer (à la hausse ou à la baisse) notamment à deux conditions : que les conditions et modalités de la révision aient été expressément prévues au contrat, et que cette évolution se fasse en fonction de critères objectifs, extérieurs aux parties.

A ce sujet, quelques précisions : (a) l’indexation automatique des prix de biens ou de services (tel le taux d’inflation publié par l’INSEE) est interdite ; (b) l’indice choisi doit être licite et notamment avoir un rapport direct avec l’objet du contrat ou l’activité de l’une des parties (ex: indice Syntec pour l’informatique) ; (c) une clause de révision du prix ne peut faire dépendre la modification du prix de la seule volonté d’un des cocontractants et, enfin, (d) dans les relations B-to-C, la réglementation prévoit que le professionnel n’est pas en droit de modifier unilatéralement le prix du bien ou du service (clause abusive).

DONC : les prix fixés et négociés dans un contrat portant sur une prestation Cloud peuvent être révisés, sous certaines conditions.

3. L’INFORMATION SUR LES PRIX ET LA TRANSPARENCE

Dans les relations B-to-C

La réglementation exige que le consommateur bénéficie d’un certain nombre d’informations pré-contractuelles. Ainsi, avant la conclusion du contrat, le professionnel doit communiquer au consommateur, de manière lisible et compréhensible le prix du bien ou du service, ainsi que tous frais éventuels supplémentaires venant s’ajouter au prix de l’objet principal du contrat. Lorsque le prix ne peut être raisonnablement calculé à l’avance, du fait de la nature du bien ou du service, le professionnel fournit le mode de calcul du prix.

Pour des raisons pratiques, les conditions financières ainsi que toutes les autres informations devant, selon la loi, obligatoirement être communiquées au consommateur (ex: l’identité du professionnel et ses coordonnées, des caractéristiques essentielles des biens ou des services, des conditions de livraison, conditions de garanties, etc.), sont généralement mentionnées dans un seul document : les conditions générales de vente ou d’utilisation.

Dans les relations B-to-B

La réglementation prévoit que tout professionnel est tenu de communiquer ses conditions générales de vente à tout acheteur de produits ou tout demandeur de prestations de services, qui en fait la demande pour une activité professionnelle (art. L.441-6 I C. com.). La communication s’effectue par tout moyen (ex: papier ou email).

Ces conditions doivent obligatoirement indiquer : les conditions et modalités de vente ; le cas échéant lorsque l’activité en question s’y prête, le barème des prix unitaires ; les réductions de prix consenties (rabais, remises, ristournes ou escomptes) ; les conditions de règlement (délais de paiement, modalités de calcul, conditions d’application des pénalités de retard, etc.).

Lorsque le prix d’un service ou d’un type de service ne peut être déterminé a priori ou indiqué avec exactitude, le professionnel est tenu de communiquer au destinataire qui en fait la demande la méthode de calcul du prix permettant de vérifier ce dernier, ou un devis suffisamment détaillé.

Les conditions générales de vente peuvent être différenciées selon les catégories d’acheteurs de produits ou de demandeurs de prestation de services. Toutefois, les conditions générales de vente constituent seulement un point de départ, le socle unique de la négociation commerciale. Dans le cadre de cette négociation, tout professionnel peut convenir avec un acheteur des conditions particulières de vente.
Dès lors, les prestataires Cloud sont libre de fixer leurs prix et, en principe, de négocier des tarifs différents avec leurs clients.

DONC : les prestataires Cloud doivent d’être transparents vis-à-vis de leurs clients quant aux conditions financières qu’ils appliquent.

4. LES CONDITIONS DE LICENCE

Au cours de la réunion, nous avons tenté d’apporter des éléments de réponse à une question soulevée par plusieurs adhérents : comment faire face aux hausses de prix des licences, parfois conséquentes, imposées par les fournisseurs et, dans ce cas, dans quelles conditions répercuter cette augmentation sur le client final?

Vis-à-vis du fournisseur de licence

Seule la négociation est envisageable, et ceci bien qu’elle ne soit pas aisée en pratique, dans la mesure où certains fournisseurs, en position de force sur le marché, imposent leurs contrats (contrats d’adhésion).

Vis-à-vis du client final

Le prestataire Cloud doit prévoir ce cas de figure dans sa politique tarifaire. Il doit réfléchir s’il souhaite ou non répercuter cette modification des conditions financières sur le client final, et s’il répercute ces évolutions, selon quelle fréquence (immédiate, trimestrielle, annuelle?). Dans l’affirmative, il conviendrait de prévoir au contrat des clauses d’indexation et de renégociation du prix. A défaut, il conviendrait de prévoir une marge suffisante pour anticiper ce type de modification.

sfezDossier préparé par Me Betty SFEZ

Avocat chez Deleporte Wentz Avocat

Ces éléments de réponse ont pour objet de fournir une information d’ordre général sur la réglementation relative au prix et ne sauraient être considérés comme une consultation juridique personnalisée.

Haut